Créée par Ordonnance N°2014-003/P-RM du 15 janvier 2014, la CVJR (Commission Vérité Justice et Réconciliation), a été mise en place par l’État du Mali, pour faire la lumière sur les différentes violations graves des droits de l’homme, commises pendant les différentes crises, qui ont secoué le pays depuis 1960. Partant de là, la CVJR a emboîté le pas à beaucoup d’autres structures similaires dans le monde, qui ont aussi œuvréau rétablissement de la dignité humaine, à la manifestation de la vérité et à la justice en faveur des victimes. Comme en Afrique du Sud, au Pérroux, en Gambie, au Canada, en Colombie etc. Mais la particularité de la CVJR avec ces structures est qu’elle a enquêté au moment des violations et ne s’est intéressée qu’aux victimes et non aux bourreaux.Le 31 décembre 2022, son mandatprenait fin, avec à la clé, une loi de réparation en faveur des victimes, votée par le CNT et son décret d’application signé, par le Président de la transition, Chef de l’État S.E le Colonel Assimi Goita. Logée dans une structure dénommée Autorités de Gestion des Réparations (AGR), la loi a pour effet, d’indemniser les victimes issues des dépositions de la CVJR. Ainsi, l’AMDH avec le soutien de son partenaire GIZ, soucieuxdu bien-être des victimes, a lancé un concours d’articles aux hommes de média, afin de faire ressortir le rôle que doit jouer la société civile dans la réparation des préjudices causés aux victimes, à traversl’AGR.
Le mandat de la CVJR
Par ordonnance N°2014-003/P-RM du 15 janvier 2014, età son article 2, la CVJR a pour mission de : enquêter sur les cas de violations graves des droits de l’homme individuelles et/ou collectives commises dans le pays et spécifiquement celles commises à l’égard des femmes et des enfants ; mener des enquêtes sur les cas d’atteinte à la mémoire individuelle et/ou collective et au patrimoine culturel ; établir la vérité sur les violations graves des droits de l’homme et les atteintes aux biens culturels, en situer les responsabilités et proposer des mesures de réparation ou de restauration ;créer les conditions de retour et de la réinsertion sociale des personnes réfugiées et déplacées ; favoriser le dialogue intra et inter communautaire, la coexistence pacifique entre les populations et le dialogue entre l’État et les populations ; promouvoir auprès des communautés le respect de l’État de droit, des valeurs républicaines, démocratiques, socioculturelles et du droit à la différence ; faire des recommandations dans le domaine de la prévention des conflits.
Les réalisations de la CVJR
Durant son mandat, la CVJR a mené beaucoup d’activités dont entre autres : les dépositions ; les audiences publiques ; le partage d’expérience avec les autres pays, la loi portant création de l’Autorité de Gestion des Réparations (AGR) et son rapport final qui doit être déposé d’ici peu.
Les dépositions
Selon Hamadoun Kampo, Chargé de communication à la CVJR, « Les enquêtes ainsi que les écoutes menées par la CVJR au cours de son mandat, ont abouti à, au moins32.700dépositions, synonymes de 32.700 victimesenregistrées et reparties sur toute l’étendue du territoire du Mali, qui doivent être indemnisées ».
Appuyé par Mme Fatoumata Touré, Présidente du Conseil National des Victimes de la Crise du Nord (CNVN), elle insiste : « Pour nous, sans la CVJR, nous n’y serons pas. Aucune identification ne serait faite, si la CVJR, n’avait pas existé ».
Les audiences publiques de la CVJR
Les audiences publiques sont des sessions solennelles durant lesquelles, les victimes avaient témoigné publiquement, devant l’opinion nationale et internationale et en présence des commissaires de la CVJR, des violations et autres atrocités dont elles ont fait l’objet. Des actes inhumains ont été révélés au grand jour, ce qui a suscité de vives émotions partout dans le pays et même au-delà.
La CVJR avait organisé au total six (06) audiences publiques, sur des thématiques différentes à savoir : les atteintes au droit à la liberté (arrestation/détentions arbitraire, enlèvements, séquestrations etc.) ; les atteintes au droit à la vie et à l’intégrité physique (meurtre, torture, traitement inhumains etc.) ; les disparitions forcées ; les atteintes au droit à la propriété (pillage) ; deux audiences spécifiques sur les violations commises contre les femmes et les enfants.
Objectifs des audiences publiques
Les objectifs recherchés par les audiences publiques étaient de : Rendre aux victimes leur dignité et faciliter un début de guérison, en reconnaissant publiquement ce qui leur est arrivé ; promouvoir la reconnaissance nationale des victimes et l’intégration de leurs récits à la mémoire et à l’histoire nationale ; utiliser l’information reçue comme un outil d’éducation et de sensibilisation pour la population dans son ensemble, afin de promouvoir le dialogue sur le passé et la réconciliation nationale.
La satisfaction de la CVJR
Au terme de son mandat (le 31 décembre 2022), la CVJR à travers son Chargé de Communication, M. Hamadoun Kampo, se dit très satisfaite aujourd’hui, de la mission accomplie et encourage la population et la société civile, à prendre le relais, pour une indemnisation totale des victimes et la réconciliation prônée par les plus autorités de la République.
La CVJR, un cas d’école
L’expérience réussie de la CVJR
est aujourd’hui, sollicitée à travers le monde. Non seulement, elle a servi à un partage d’expérience avec la Tunisie, le Maroc, le Togo, le Perroux et autres mais, est aussi, entrain d’aider la République Centrafricaine à mettre en place sa structure de vérité, Réconciliation et Réparation.
Autorité de Gestion des Réparations
Pour indemniser au moins 32.700 victimes issues de différentes crises sociopolitiques survenues au Mali, la CVJR a fait voter par le CNT (Conseil National de la Transition), une loi de réparations. La Loi N° 2022-041 du 15 novembre 2022 votée par le CNT et son Décret d’application N° 2022 – 0730/PT-RM du 23 novembre 2022, signé par le Président de la transition, Chef de l’État S.E le Colonel Assimi Goita, consacrent la création, la mission et les modalités de fonctionnement de l’Autorité de Gestion des Réparations (AGR). Sa principale mission est d’assurer la gestion des réparations des préjudices causés par les violations graves des droits de l’Homme lors des crises au Mali depuis 1960 en faveurs des victimes ou leurs ayants droit.
Rôle de la société civile : veiller au grain…
Pour arriver aux différentes réparations et remettre les victimes individuelles ou collectives dans leurs droits, la société civile doit d’abord s’approprier les différentes recommandations qui sortiront du rapport final de la CVJR. Ensuite, elle doit comprendre la mission de l’AGR (Autorité de Gestion des Réparations) et s’enapproprier. Elle doit aussi s’approprier le contenu de toutes les dispositions juridiques et réglementaires concernant la réparation. Enfin si cela est fait, elle doit veiller au grain, en offrant son accompagnement sans faille et le suivi régulier des actions menées parl’AGR, pour qu’au finish, les victimes puissent être indemnisées à hauteur de souhait et conformément à la loi. Toute chose qui aboutira à la paix, la réconciliation et la cohésion sociale.
Pépin Narcisse LOTI