A LA UNEBarrick Gold et l’État malien: fin d’une saga juridico-économique

Barrick Gold et l’État malien: fin d’une saga juridico-économique

Après plusieurs mois de tensions, d’arrestations spectaculaires et de procédures judiciaires, le bras de fer entre l’État malien et le géant minier canadien Barrick Gold a trouvé son épilogue. Ce 24 novembre, les deux parties ont annoncé la signature d’un accord historique, censé clore l’un des plus retentissants différends miniers de la décennie au Mali : le litige autour du complexe aurifère de Loulo-Gounkoto.

Le différend entre Bamako et Barrick Gold, opérateur du complexe Loulo-Gounkoto dans la région de Kayes, s’était intensifié au fil des mois. En toile de fond : des accusations de non-paiement de taxes, des désaccords sur la répartition des revenus, et des tensions croissantes sur la gouvernance des ressources naturelles. L’affaire avait pris une tournure judiciaire, avec l’arrestation de plusieurs cadres du secteur minier et des perquisitions dans les locaux de la société. Ce bras de fer, suivi de près par les observateurs du secteur extractif, cristallisait les enjeux de souveraineté économique et de transparence dans la gestion des ressources stratégiques du pays.

Face à l’impasse et aux risques économiques croissants, les autorités maliennes et Barrick Gold ont finalement privilégié la voie de la désescalade. L’accord signé le 24 novembre 2025 prévoit, selon les premières informations disponibles, une révision des termes de l’exploitation du complexe Loulo-Gounkoto, avec une meilleure redistribution des revenus au profit de l’État malien.

Si les détails précis de l’accord n’ont pas encore été rendus publics, des sources proches du dossier évoquent un compromis sur les redevances minières, la fiscalité applicable, ainsi qu’un engagement renforcé de Barrick en matière de contenu local et de développement communautaire.

Selon plusieurs économistes interrogés, cet accord pourrait générer plus de 220 milliards FCFA par an pour le budget de l’État malien. Une manne significative dans un contexte de pression budgétaire accrue, marqué par les défis sécuritaires, les besoins en infrastructures et les ambitions de relance économique.

Ce regain de recettes publiques pourrait notamment renforcer les capacités de l’État à financer les services sociaux de base, à soutenir les collectivités locales des zones minières, et à investir dans la diversification économique.

Ce mardi matin dans les rues de Bamako, l’annonce de l’accord suscite des réactions contrastées.

« C’est une bonne nouvelle si cela permet à l’État d’avoir plus de moyens. Mais il faut que cet argent serve vraiment à améliorer nos hôpitaux, nos écoles, pas à enrichir quelques-uns», confie Fatoumata Diallo, commerçante.

« Nous vivons à côté de ces mines depuis des années, mais nos villages n’ont ni eau potable ni routes. J’espère que cette fois, les promesses seront tenues», renchérit  Mamadou Sissoko, ressortissant de la région  à Bamako.

« Cet accord montre que le Mali peut défendre ses intérêts. Mais il faut aller plus loin : revoir tous les contrats miniers et impliquer davantage les jeunes dans la gouvernance », ajoute  Abdoulaye Traoré, étudiant en économie.

Pour Dr Moussa Cissé, économiste spécialisé en industries extractives, cet accord marque un tournant majeur pour l’Etat du Mali et au-delà.   

« Le cas Barrick est emblématique. Il montre que les États africains peuvent renégocier des contrats déséquilibrés, à condition d’avoir une stratégie claire et une volonté politique forte. Mais pour que cela profite réellement à la population, il faut renforcer la transparence budgétaire et impliquer la société civile dans le suivi des engagements», soutien-t-il.

Souleymane Coulibaly

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